Le « covidien » d’Eric Mathais – Procureur de la République à Dijon

C’est une vision inédite : « Normalement le tribunal c’est comme une ruche. Là ça n’a rien à voir, ça ressemble aux rues vides de Paris. » confie Eric Mathais, procureur de la République à Dijon. Tous les jours 180 professionnels – sans compter les avocats – de justice se pressent dans ce lieu. Le public lui va et vient sans discontinuité :  près de 300 personnes par jours passent les portes du tribunal de Dijon.

Depuis quelques semaines, si le gel hydroalcoolique fait partie du décor le public, lui, a déserté : il se compte sur les doigts d’une main. Les professionnels autorisés à se rendre au tribunal sont aussi très peu : « environ 20 » et Eric Mathais en fait partie. Lui, qui avait entre 5 et 6 réunions par semaine à l’extérieur, est confiné entre son domicile et son lieu de travail. Ses réunions hebdomadaires avec son équipe sur l’organisation du parquet ne font plus partie de son planning. Désormais, comme beaucoup, il converse avec la plupart de ses collègues sur whatsapp, par mail ou par visioconférences : « La justice c’est un vrai travail d’équipe, donc le fait que ce soit réduit et en virtuel c’est un manque. »   

Le confinement a épargné la fermeture des tribunaux mais pas son rythme. Les contentieux essentiels, « les urgences » continuent d’être traités. Au total, d’après Eric Mathais : « Seulement 5% des dossiers sont traités pendant la période de pandémie. » Une situation inédite qui arrive à la suite d’une grève intense des avocats au début de l’année.

« Depuis janvier, on renvoyait presque 80% des dossiers ». En période normale, le tribunal de Dijon accueille une à deux audiences correctionnelles par jour « en ce moment c’est trois par semaines » confie-t-il.  

Des audiences « semi-virtuelles » qui ont le goût du futur.  Plus question de ramener les détenus dans les boxes prévus, ils sont désormais jugés par visioconférences : « Avant c’était assez rare, il fallait que le détenu soit d’accord, maintenant on ne pose pas la question, c’est la règle. » Une activité réduite « aussi parce que les policiers et gendarmes s’occupent davantage de faire respecter les règles du confinement. » Les autres contentieux vont devoir attendre un retour à la normale avant d’être traités. Mais le procureur n’a pas allégé sa charge de travail pour autant. Depuis la crise sanitaire, ils ont instauré avec le président du tribunal, le greffier et son adjoint, une « cellule de crise », un groupe qui se réunit virtuellement et régulièrement pour « gérer toutes les problématiques nouvelles : le flux de personnes ou le manque de gel par exemple ». Il continue de se rendre au tribunal vers 7h30 « mais c’est vrai que je rentre un peu plus tôt. » 

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