Interview – Fabrice Valay, CEO Famirelay

1. Bonjour et merci d’avoir accepté cette entrevue pour parler de votre usage de LinkedIn ! Dans un premier temps, pourriez-vous vous présenter ainsi que votre entreprise ?

Je suis Fabrice Valay, j’ai 57 ans. J’ai étudié à HEC et ai fait toute ma carrière dans le domaine du digital et du numérique. J’ai commencé chez Ubisoft, avant de poursuivre à la FNAC. J’ai également été chez Merck & Co, où j’ai créé le premier site d’information pour les professionnels de santé.

Quand je suis devenu aidant, cela a changé le cours de ma carrière car j’ai décidé de mettre mon expertise digitale au service des aidants pour les accompagner dans une situation complexe à gérer humainement et professionnellement. De plus, il n’existait pas réellement de solution pour les soutenir. Avec mon associé, nous avons donc créé Famirelay, une solution pour aider les aidants et leur entourage au quotidien. C’est une application mobile conçue pour permettre à des proches aidants (famille, amis, voisins, et tous les acteurs impliqués autour d’une personne vulnérable) de se coordonner entre eux, de communiquer entre eux et avec les intervenants professionnels. Sur une seule et même plateforme, on retrouve donc toutes les personnes qui accompagnent une personne fragilisée par la vie : maladie, âge, handicap.

Lorsqu’on est confronté à une personne vulnérable au sein de la famille, il y a du déni, des absences ou des mauvaises informations partagées entre les différents intervenants. Très rapidement, un aidant principal ressort de cette situation – pour  73%, il s’agit d’une femme – et prend en charge une très grande partie des taches, et cela pèse très lourd : que ce soit professionnellement, socialement, dans le quotidien, dans la culpabilité de ne jamais faire assez bien… Pendant que pour tout le reste de la famille, cela reste souvent opaque. On a donc créé cette solution pour fluidifier les échanges, éviter les répétitions et appels téléphoniques inutiles, les oublis, etc. Grâce à cette application, on peut non seulement solliciter les autres, mais ces derniers ont également accès à toutes les informations nécessaires pour pouvoir vous remplacer. Notre philosophie est de croire que les aidants ne se reconnaissant pas en tant que tels, c’est au travers des entreprises qu’il faut passer pour les aider car ces dernières ont un intérêt économique réel à les soutenir. Une économiste de l’OCIRP, Nathalie Chusseau, a évalué le coût des aidants en entreprise à 10% de la masse salariale. 20% des salariés sont aidants, et sur ces 20%, deux-tiers sont référents dans la famille. Ils vont donc passer jusqu’à 1h15 par jour pendant les heures de travail à gérer des choses en lien avec l’aidance. Si on les aide à mieux prendre en charge leurs proches, ils peuvent alors être plus présents dans leur travail, moins fatigués et tout le monde a à y gagner.

Famirelay a été lancé en septembre dernier sous forme MVP, et on a commencé la commercialisation en décembre. Aujourd’hui, on compte des sociétés comme Rémy Cointreau, Nutrisens ou encore Sapian. Nous avons également un partenariat avec l’AP-HP, et nous allons offrir l’application à l’ensemble du personnel hospitalier de l’hôpital Beaujon.

Je suis devenu aidant de ma mère, et un ancien collègue de chez Ubisoft est venu me voir un jour pour me dire qu’il rencontrait des problèmes professionnels. J’ai compris que ces derniers étaient liés à sa mère, qui avait Parkinson. Il était son aidant principal, et plus il en parlait, plus ça me renvoyait à ce que moi je faisais pour la mienne. Comme 50% des aidants, je n’avais pas conscience que je l’étais et c’est lui qui me l’a fait comprendre par son histoire. On rencontre tous les mêmes problèmes, et des solutions digitales peuvent être mises en place pour réellement faciliter la vie des aidants.

L’avantage de se reconnaitre comme aidant est que cela donne accès à des ressources comme Famirelay, mais aussi à la boussole des aidants, à des collectifs d’aides locaux, et aux nombreuses associations qui existent.

LinkedIn est une plateforme sur laquelle je suis inscrit depuis toujours ! J’ai été l’un des premiers utilisateurs en France, et je trouve qu’encore aujourd’hui, elle n’a pas d’équivalent. Pour moi, elle est assez fabuleuse pour diffuser des contenus, s’informer, alerter, voire « débattre ». Je m’en sers pour faire connaitre mon activité et pour me connecter avec des partenaires potentiels, des clients, des prospects, et de manière très régulière. Je passe effectivement beaucoup de temps dessus et dans une approche principalement Inbound. Je reçois beaucoup, mais parce que je me rends visible. Par exemple, Famirelay a été mentionnée dans le magazine Challenge comme l’une des 100 startups où il faut investir en 2025 ! Nous en sommes très fiers et nous communiquons intensément là-dessus.

2. Comment utilisez-vous LinkedIn aujourd’hui dans le cadre de votre activité ? Êtes-vous davantage dans la pratique de l’Inbound ou de l’Outbound Marketing ?

Cela génère des republications, des vues et beaucoup prennent contact avec nous, des gens qui aident à faire des levées de fonds par exemple. Je m’en sers aussi à titre individuel pour évangéliser et éduquer sur ce qu’est l’aidance et transmettre des chiffres. Par exemple, quand je dis que 20% des salariés sont aidants, parmi ces derniers, il faut surtout mentionner que 71% ne se déclarent pas. Soit ils ne savent pas qu’ils sont aidants, soit ce sont majoritairement des femmes qui n’osent rien dire de peur d’être mises au second plan professionnellement… Cela dépend des milieux professionnels et des régions, mais ce sont des statistiques nationales.

J’alerte donc sur ce type de chiffres pour que les RH se rendent compte qu’ils ont bien plus d’aidants qu’ils ne le pensent. Je transmets des « best practices » dans le but de sensibiliser les key opinion leaders du domaine. On a cependant encore beaucoup de chemin car c’est un sujet qui se situe entre la vie privée et publique et comme c’est quelque chose de caché, c’est assez tabou en entreprise (comme a pu l’être le manque de diversité il y a 15 ans ou les inégalités de genre il y a 30 ans…). Aussi, l’un de nos premiers clients est Rémy Cointreau, dont le DRH est membre du Comex de l’ANDRH ! Cela renforce encore davantage notre communication sur ce sujet.

L’Outbound quant à lui reste marginal car je le trouve coûteux sur LinkedIn, en temps et en argent.

Au-delà de LinkedIn, qui reste notre outil principal, nous avons également d’autres réseaux sociaux (Instagram, une page Facebook) mais sur lesquels nous postons très peu. Cela devient vite cher, d’autant que nous essayons de pratiquer des prix très bas ; nous n’avons donc pas les moyens pour investir énormément dans le digital.

3. Quelles évolutions majeures avez-vous observé dans la manière que vous avez de prospecter depuis l’apparition et la démocratisation de la plateforme ?

Tout ce qui relève de la possibilité de faire des introductions, d’échanger avec des pairs et avoir des messages gratuits en fonction de son statut. J’ai personnellement un abonnement payant sur LinkedIn, ce qui me permet de me connecter avec plus de gens et notamment des DRH et des personnes que je n’aurais pas pu contacter autrement. On sait qu’elles sont sur-sollicitées, c’est déjà donc très compliqué de pouvoir entrer en contact avec elles. Si on réfléchit correctement à son message, qu’on le personnalise bien, alors on peut faire des introductions de qualité qui donnent parfois lieu à de belles rencontres.

Pour autant, je trouve que c’était plus simple avant, à ses débuts. Les critères se sont restreints, et il y a la difficulté de l’évolution-même de la plateforme qui dans son esprit et ses fonctionnalités était avant très focalisée sur un monde et des échanges purement professionnels. Aujourd’hui, c’est surtout un outil de mise en avant de compétences réelles ou imaginées, ou encore de choses plus personnelles. Si on regarde la plateforme il y a 4 ans, on trouvait encore des commentaires du type « cela n’a rien à faire sur LinkedIn ». Maintenant, tout a été banalisé.

Une pratique en particulier va dans le sens de cette évolution : certains jouent avec les forces et les faiblesses de l’algorithme et vont demander à ChatGPT de rédiger des textes pour correspondre à ce dernier. On arrive donc devant des publications vides et sans réel intérêt. Cela tue à mon sens l’usage qu’ont d’autres personnes de la plateforme. Je m’interdis complètement de faire des posts revus par l’IA car, quelle que soit sa qualité, on sait reconnaitre un texte qui n’a pas été rédigé par l’humain.

Mais cela n’enlève rien au fait qu’à mon sens, aucune plateforme ne peut être aujourd’hui comparée à LinkedIn. Il y a eu un certain nombre de tentatives, comme Hello Masters : ils ont la force du marché déjà établi, mais il est extrêmement dur de concurrencer LinkedIn.

4. Diriez-vous que LinkedIn est facilitateur ? Dans quelle mesure ?

Oui, cela reste un outil de proximité avec une assurance de capacité de connexion qui facilite la création de relations que nous n’aurions pas eues autrement. Ce que j’aimais beaucoup avant avec cet outil étaient les recommandations que l’on pouvait se faire mutuellement. Cela mettait bien en avant les profils et les compétences de chacun, c’était très qualitatif. Maintenant, la viralité qui donne de la visibilité à un grand nombre dégrade un peu cet aspect-là.

5. Que changeriez-vous pour que LinkedIn réponde encore mieux à vos besoins ?

Je dirais qu’il faudrait remettre en avant des outils de recommandation encore plus poussés et personnalisés, et de confiance. Je pense également au développement de meilleurs outils pour optimiser les campagnes publicitaires, un peu à la Meta où l’on serait capable d’attaquer très précisément une cible, des lookalike, afin d’avoir des retours et un reporting fiables, et sur lesquels on pourrait s’appuyer pour bâtir une véritable stratégie !

Rendez-vous sur le site FAMIRELAY

Retrouvez tous nos articles et interviews ICI

Leave a Reply

Your email address will not be published.

Share This

Copy Link to Clipboard

Copy