Le « covidien » de Laurent Simoni – Guide de haute montagne

Laurent Simoni, guide de haute montagne : « La montagne est fermée »

Il y a un an, Laurent Simoni était au col du Grand Saint-Bernard, point culminant de la Via Francigena entre la Suisse et l’Italie. « J’étais en raid à ski avec des clients » raconte-t-il. Les mois de mars et avril sont propices à cette activité qui représente le plus gros du chiffre d’affaires de sa profession. « En raid à ski tu pars plusieurs jours d’affilés et qu’il fasse beau ou moche, t’es obligé d’avancer donc pas d’annulation possible, contrairement à ce qui peut arriver en été avec l’alpinisme ». Avec le confinement, les 5 réservations prévues ont été annulées. « J’étais abasourdi par la nouvelle du confinement, la montagne est fermée ». Plus de rentrée d’argent et plus aucune possibilité de réaliser des sorties seul : les assurances ont prévenu «  en cas d’accident pendant cette période, les guides ne sont pas couverts ». La décision fait polémique chez les guides de Chamonix et de Saint-Gervais, « beaucoup réclamaient un droit à s’entraîner » raconte Laurent. En effet, le métier de guide – de la même manière qu’un sportif de haut-niveau- requiert une excellente condition physique et une acclimatation suffisante.

 « On a le droit comme tous les Français de pratiquer une activité sportive jusqu’à 1km près de chez nous et de grimper à 100 mètres de dénivelé », c’est-à-dire a presque rien pour cet habitué de la grimpe et autres sommets de 4 000 mètres. Alors à la maison, il tente de s’entraîner : « j’ai installé un  mur avec des prises, on établit un programme d’entraînements avec mon fils, et puis je marche tous les jours… ». Une activité physique bien loin de sa forme habituelle, « évidemment je perds en acclimatation, il faudra rattraper ». Pour l’heure, les guides espèrent s’entraîner de nouveau à partir du 11 mai, et préparer le début de la saison « l’idéal serait de tester les équipements, les via ferrata avant d’accueillir les clients début juin si possible » espère-t-il. Une reprise de la saison avec de nombreuses inconnues, à commencer par l’ouverture des refuges et des remontées mécaniques. Pour Laurent Simoni, l’enjeu est de taille « on sait déjà que l’Italie n’ouvrira pas ses refuges de l’été, donc cela supprime pas mal de possibilité de sorties, et en France c’est encore difficile de se projeter ». Pour de nombreuses expéditions, à commencer par la star de la région, le Mont-Blanc, les refuges sont essentiels : ils évitent les bivouacs, un confort pour les clients. Même topo pour les remontées mécaniques, le guide imagine mal des sorties à la manière de « Paccard-Balmat », les premiers à atteindre le sommet de l’Europe depuis la vallée, « c’est quasiment impossible pour beaucoup de client, tant l’effort est intense » prévient le guide. S’il ne peut pas travailler cet été, Laurent Simoni se tournera vers la Suisse « travailler dans le bâtiment par exemple, je ne peux pas rester sans rien faire autant de temps ». En attendant de renfiler ses crampons et son piolet, Laurent Simoni est bien chanceux, sa fenêtre dessine l’horizon des montagnes.

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