Le « covidien » de Robert Sioud – Primeur

L’interdiction des marchés, Robert Sioud l’avait sentie venir… sans vraiment y croire. Il y a deux semaines il affiche soigneusement son numéro de téléphone sur son stand, à Clichy (92), « On ne sait jamais » dit-il aux clients.  Le 24 mars, la décision tombe. Les marchés ferment, sauf dérogation. 

Il tente d’appeler la mairie pour savoir s’il peut profiter de ce précieux sésame. Impossible. Robert est stressé : il lui reste 10.000 kg de marchandises à écouler et plus de possibilité de vendre. Alors il appelle son copain fromager. Rapidement, les collègues échangent leurs contacts de clients : un petit fichier d’une centaine de personne. Il envoie quelques sms pour prévenir : « Je peux me déplacer sans problème pour livrer », assure-t-il. Les clients répondent à l’appel de Robert. Mieux que ça, une véritable chaîne de solidarité se crée. « J’ai une cliente qui habite à Bagnolet, elle a carrément collé mon numéro dans tout le quartier, j’ai eu tellement d’appels… », raconte-t-il encore étonné. D’autres fidèles affichent son numéro dans les cages d’escalier, une affiche avec sa photo fait même partie du décor de certaines rues. La machine s’emballe. Vingt, cinquante, quatre-vingt, Robert Sioud atteint les deux cents commandes le week-end dernier, « une folie ». 

Évidemment son premier week-end comme livreur est « Fouilli, mal organisé, j’avais trop de commandes, je ne savais plus comment gérer ». Mais le primeur a de la chance. Face à ce nouveau métier, ses clients répondent – une fois de plus – à l’appel. Et c’est une petite entreprise qui s’organise. Trois de ses clients décident de gérer les commandes, uniquement par mail, un autre s’occupe exclusivement du parcours : « Pour que je perde le moins de temps possible ». Depuis dix jours, Robert est tout le temps sur la route, gants, gel hydroalcoolique et kit mains-libres scotché sur les oreilles « Au moins y a pas de circulation, c’est bien l’avantage du confinement », plaisante-t-il. 

Robert garde sa bonne humeur : « Depuis quelques jours c’est dingue ce qui m’arrive ! Le nombre de mots d’encouragement, d’appels, ça m’a redonné foi en l’humanité … ». Depuis, il a écoulé son stock de fruits et légumes, a pu embaucher de nouveau son salarié – en chômage partiel depuis 10 jours – et il continue de travailler « deux fois plus qu’en temps normal ». Mais pour l’instant, il perd près de 50% de son chiffre d’affaire. Pourtant, ce commerçant reste optimiste : « Je pense pouvoir doubler mon chiffre d’affaire d’ici la fin de l’année si le confinement continue. » Et si celui-ci se termine plus tôt, tant mieux : « Au moins j’aurai gagné des clients et je sais que je peux développer ce genre d’activité. »

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