Vincent Aboyans-Billiet, Co-fondateur Harmony Inside

1.Bonjour et merci d’avoir accepté cette entrevue pour parler de votre usage de LinkedIn ! Dans un premier temps, pourriez-vous vous présenter ainsi que votre activité ?

Je m’appelle Vincent Aboyans, et je suis ce qu’on appelle un « harmoniste d’entreprise ». Depuis 5 ans maintenant, je fais partie de B-Harmonist, collectif qui accompagne les entreprises de toutes tailles sur leurs problématiques de culture d’entreprise : comment maintenir un alignement entre tous les collaborateurs sur la vision, la mission, les valeurs de l’entreprise et comment les mettre en cohérence avec toutes les pratiques sur des sujets comme le recrutement, l’onboarding, etc. En parallèle, j’anime le podcast « Harmony Inside » que Serendip connait bien puisque Franck est passé dessus il y a quelques années ! On est aujourd’hui à plus d’une centaine d’interviews de dirigeants qui viennent parler de culture d’entreprise.

On vient par ailleurs de créer un label qui s’appelle également « Harmony Inside » qui permet de mesurer la force d’une culture, l’alignement et l’engagement des collaborateurs avec un indicateur appelé l’« Harmony index » ; en fonction du résultat, l’entreprise obtient ce label. Cela permet de mettre en avant des entreprises qui font ce qu’elles disent et qui disent ce qu’elles font !

2. Depuis quand utilisez-vous LinkedIn et à quelle régularité ?

J’ai commencé à utiliser LinkedIn en 2020. Cela correspond au moment où je suis devenu indépendant au sein de B-Harmonist et durant lequel j’ai eu besoin d’aller chercher des clients. C’est aussi la période où LinkedIn a un peu explosé pendant le confinement. Et à quelle régularité ? On va dire que j’ai un peu tout essayé : tous les jours, quand j’ai envie, une, deux ou trois fois par semaine. Aujourd’hui, je poste une à deux fois par semaine, selon ce que j’ai à raconter et le temps que je peux y consacrer.

Je ne suis pas formateur LinkedIn, je ne peux pas dire ce qui marche véritablement ou pas, mais je pense qu’il est intéressant de se demander : quand LinkedIn n’est pas ton métier, comment bien s’en servir sans y perdre tout son temps et son énergie ? Car c’est le piège.

D’autant qu’avec la présence des « influenceurs » LinkedIn, il est difficile de s’y retrouver. Beaucoup postent tous les jours, et dans cette masse, le niveau est parfois assez bas. Tout dépend de l’image de marque qu’on veut se donner, mais de plus en plus de gens écrivent leurs posts avec de l’intelligence artificielle. Certains vont même jusqu’à programmer une IA pour laisser des commentaires sur les publications de personnes avec peu d’engagement (c’est un très bon moyen de gagner des abonnés) et on finit par avoir une IA qui répond à une autre IA… Dans tout cela, où sont les vrais gens ? Je ne sais pas !

Aujourd’hui, il y a généralement moins de vues. Les taux d’engagement sont donc meilleurs. J’ai rédigé un post qui a « explosé » il y a environ 2 ans. Je l’ai posté deux fois, et deux fois il a fait près de 150 000 vues et 1000 likes. Mais du coup, mon taux d’engagement n’était de même pas 1% !  

C’est dur de faire du LinkedIn, mais pour moi, le but n’est pas de se mettre la pression à vouloir toujours faire mieux, mais de poster selon ce que tu as envie de dire et de faire, sans tomber dans le piège de faire des lieux communs en enfonçant des portes ouvertes avec des images déjà toutes faites. Tu auras peut-être mille réactions, mais derrière, il n’y a aucune qualité et tu ne signeras personne grâce à ça. Si t’es un pro qui souhaite vendre un produit, parle à ta cible, parle de ses préoccupations. C’est comme ça que tu restes dans son esprit, que tu lui apprends potentiellement quelque chose et par ce biais-là, peut-être qu’un jour il pensera à toi. Il faut arrêter de croire que c’est une machine à cash – ou alors, c’est ce que je ne l’ai pas encore craqué !

3. Quels changements avez-vous observé dans l’usage que les gens ont de la plateforme ? La vôtre ?

C’est dur de répondre sachant que l’algorithme a changé tellement de fois… Les gens courent beaucoup après ce dernier, à tel point que raconter des choses intéressantes devient secondaire. Aujourd’hui, LinkedIn est devenu un peu une fin en soi, et il y a cette injonction de « publier pour publier » dans le simple but de rester dans les bonnes grâces de l’algorithme, et de ne pas tomber dans l’oubli. Au début, je faisais énormément de posts « storytellés » où je parlais de moi et de mes expériences. Ça marchait bien, car les gens pouvaient s’y identifier, et cela permettait de créer de l’engagement.

Je vois aujourd’hui beaucoup d’histoires très similaires, écrites un peu différemment d’une personne à une autre, mais toujours avec ces mêmes accroches « putaclic ». Tous les gros comptes LinkedIn disent d’ailleurs que c’est ce qu’il faut faire. Il existe des Frameworks que les gens prennent en changeant l’angle pour raconter des histoires et émouvoir les gens, partager une expertise, etc.

Aujourd’hui, je m’en sers principalement pour parler de mes sujets d’expertise et parfois pour écrire un truc spontané, quand j’ai une réflexion, ou qu’un sujet actuel me parle. Je l’utilise aussi beaucoup pour promouvoir mes autres outils de communication comme le podcast, dont l’avantage est que c’est un support qualitatif mais qui ne sert à rien si tu ne fais pas de distribution. C’est un peu le haut du funnel : essayer d’attirer les gens en surface pour les rediriger vers d’autres contenus plus intéressants.

Souvent, je compare avec l’époque où les blogs étaient très à la mode. On pouvait trouver des blogs d’entrepreneurs Tech avec de très bons articles de fond. Et à une certaine période, LinkedIn a un peu suivi cette tendance-là : les gens y écrivaient des bons articles (un peu plus court pour correspondre aux restrictions de la plateforme) informatifs. Ce n’est plus le cas et c’est assez démoralisant et décourageant car on voit toute la journée des comptes qui font énormément de likes alors que leur contenu est vide de sens.

On peut donc se poser la question : quelle autre plateforme peut être en mesure aujourd’hui de mettre en lumière les travaux et contenus qualitatifs ? A mon sens, c’est quelque chose d’assez mauvais en tant que professionnel de se perdre dans ces formes de communication superficielles. Cela peut en revanche être un bon moyen de faire une première touche en surfant sur l’algorithme, pour ensuite rediriger les gens vers d’autres formes plus poussées : podcasts, newsletters, articles, etc.

Je ne sais absolument pas si un jour le fonctionnement changera : les contenus longs et plus qualitatifs reviendront-ils un jour au premier plan ? Ils ont essayé fut un temps, mais je n’ai pas eu l’impression que cela avait fonctionné.

L’autre usage de LinkedIn que je fais maintenant, c’est écrire aux gens. Si quelqu’un avec un profil potentiellement intéressant dans le cadre de mon travail réagit à un de mes posts, je vais aller lui parler en privé. C’est un bon prétexte pour engager une conversation plus poussée avec les autres !

4. Diriez-vous que LinkedIn est aujourd’hui un indispensable quand on gère une activité comme la vôtre ? Pourquoi ?

Spontanément, je dirais que non. Pleins de gens s’en sortent très bien sans LinkedIn. Mais ce qui est indispensable, c’est d’avoir du réseau, de s’en créer un, de parler à des gens qui rentrent dans ta cible, de parler à tes clients le plus souvent possible et te rappeler à leur bon souvenir une fois de temps en temps. Si ton plaisir, c’est d’aller dans des meet-up à la rencontre des gens, il faut le faire ; si tu préfères juste écrire, alors fait-le. Le mieux est de tester un peu toutes les manières de faire et voir ce qui te convient le plus.

5. Des conseils à celles et ceux qui souhaiteraient se lancer sur LinkedIn pour se promouvoir ?

Je conseillerais de ne pas jouer avec les règles du jeu tout de suite : écrire s’ils ont cette envie, même si leur façon de faire ne correspond pas du tout aux «normes » dictées. Garder leur ligne et être en cohérence avec leur personnalité. Je dirais qu’il faut dès le début se poser cette question : pourquoi je me sers de LinkedIn, et qu’est-ce que je cherche dans l’utilisation de ce canal-là ? Et se donner du temps : ce n’est pas parce que son premier post ne fonctionne pas qu’il faut abandonner sans réessayer.

Et tout cela ne veut pas dire que LinkedIn ne peut pas jouer un rôle spécifique dans une étape du process de vente. Mais à lui seul, ce n’est pas une fin. Publier du contenu inspirant avec une photo de soi dès qu’on est indépendant, cela va surtout attirer un public d’indépendants, et non des clients. Il est toujours mieux d’avoir 10 likes de gens dans ta cible que 1000 de personnes qui n’ont rien à voir avec ton business.

Pour moi, le but de LinkedIn à long terme, est de donner de la confiance aux gens qui te lisent, dans ce que tu fais et qui tu es, et c’est à toi seul de voir quelle image tu souhaites projeter pour générer de la confiance.

Retrouvez tous nos articles juste ICI

Leave a Reply

Your email address will not be published.

Share This

Copy Link to Clipboard

Copy